En doctorat, il est obligatoire de publier et de communiquer ses résultats.
Les écoles doctorales sont très claires :
👉 Pas de publications, pas de doctorat.
👉 Pas de communications, pas de doctorat.
Le problème, c’est la formation des doctorants à ces pratiques.
Plusieurs écoles doctorales jouent le jeu et proposent des formations aux doctorants dès la première année.
Mais ce n’est pas le cas partout, et force est de constater que les formations sont de qualité inégale selon les écoles.
Les jeunes chercheurs inscrits en première année sont souvent démunis :
Comment fait-on pour publier et communiquer en doctorat ? Faut-il écrire un article puis le soumettre, ou chercher des appels ? Qu’est-ce qu’un appel ? Où en trouver ? Comment faire une veille sur les appels ? Comment passer à l’action et envoyer son premier abstract ?
Ces questions, tous les doctorants se les posent.
Mais ce qui est incroyable, c’est que la plupart d’entre eux pensent avoir raté quelque chose en master ou en première année de thèse.
C’est votre cas ?
Rassurez-vous, ce n’est pas vous : la formation est absente en master, mais elle est considérée comme acquise en doctorat.
Alors, on fait comment ?
Pour vous aiguiller et vous transmettre les bases, j’ai créé pour vous cet article et sa vidéo qui vous permettront d’acquérir les outils les plus importants pour démarrer votre vie en recherche.
1. Publier et communiquer en doctorat : la théorie
Acquérir le vocabulaire et comprendre les pratiques
La première chose à savoir lorsqu’on veut participer à un colloque ou publier un article, c’est par où commencer.
Le plus simple au début, c’est de repérer ce qu’on appelle des « appels à contribution ». Il peut s’agir d’appels à communication, ou d’appels à publication.
Les premiers vous offrent la possibilité de venir participer à un congrès, à un colloque ou à une journée d’étude en tant que speaker – c’est-à-dire en tant que conférencier. Les congrès, les colloques et les journées d’études sont des évènements scientifiques qui sont organisés par les chercheurs des laboratoires, parfois en partenariat avec des institutions extérieures.
Les seconds vous offrent la possibilité de publier vos résultats dans une revue scientifique. De même, ces appels à publication sont l’initiative de chercheurs qui souhaitent réunir un ensemble de publications sur un sujet ou une thématique.
NB : certains appels à contribution invitent les chercheurs à communiquer lors d’un évènement qu’ils organisent, en précisant qu’il y a une publication à la clé. Cela signifie qu’après l’évènement, ils ont l’intention de publier les textes des intervenants dans une revue scientifique. Les participants font donc un « coup double » (1 com + 1 publication) et ce type d’appel est le plus intéressant pour les chercheurs.
La grande majorité des appels à contribution sont sélectifs. Pour vous éviter de rédiger une communication ou une publication complètes sans savoir si votre proposition sera retenue, les équipes vous demandent d’envoyer ce qu’on appelle un « abstract », qui est un résumé de votre proposition.
Cela répond en partie à l’une des questions de l’introduction : faut-il rédiger un article puis le soumettre à une revue ?
En début de carrière, je vous conseille d’éviter cela et de privilégier la recherche d’offres. Pourquoi ?
Pour éviter le risque de rédiger « pour rien ». Un article que vous allez cadrer sans savoir dans quel numéro de revue il pourrait paraître, c’est prendre le risque de le voir refuser : les revues scientifiques ont des lignes éditoriales et des programmes de publication qui sont définis au moins un an en avance – souvent plus. Il est donc très difficile de « faire passer » un article dans une revue, surtout si personne ne vous connaît.
Plus tard, lorsque la recherche connaîtra mieux votre nom, il sera envisageable de rédiger en amont. Cela reste une pratique assez rare, même si de nombreux chercheurs rédigent des articles qu’ils gardent sous la main et qu’ils proposent lorsqu’une offre correspond.
L’intérêt de privilégier la recherche d’offres, c’est que ces dernières sont cadrées par les équipes, avec souvent des axes très précis qui permettent d’indiquer quels sont les angles d’attaque possibles sur une thématique donnée.
Répondre à une offre vous permet d’engager peu de temps au départ. Si vous êtes sélectionné, vous allez apprendre les règles et les usages qui sont de rigueur en recherche : comprendre le processus qui conduit à intervenir comme speaker ou à publier dans une revue, apprendre le vocabulaire, vivre une première préparation, travailler en équipe, préparer un éventuel déplacement, faire la communication le jour J et vivre la sortie de la première revue dans laquelle vous serez publié, sont des étapes d’apprentissage importantes de votre métier de chercheur.
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Combien de temps prévoir ?
La durée de ces processus est plutôt longue : comptez 3 à 6 mois pour préparer une communication – entre le moment où vous trouvez une offre et le jour de l’évènement.
Pour une publication, les délais sont de l’ordre de 12 à 36 mois (parfois davantage) entre le moment où vous trouvez une offre et le jour où la revue sort.
Plus la publication sera prestigieuse, plus ce sera long. Une publication en ligne est généralement rapide car simplifiée, il n’y a pas de version papier ni de maison d’édition avec laquelle travailler et souvent, ces publications sont moins sélectives – et donc moins prestigieuses.
Les revues à comités de lecture et les chapitres d’ouvrages collectifs sont les plus longs à paraître car chaque membre du comité de lecture va relire votre article et proposer ses corrections. Vous devrez ensuite procéder aux corrections, qui sont souvent conséquentes en début de carrière. Chaque membre du comité va ensuite relire et valider ou non les corrections apportées.
Cela peut durer longtemps, et la publication reste « bloquée » tant que tous les articles de la revue ou de l’ouvrage ne sont pas passés au crible du comité, (re)corrigés et validés. Ces publications-là sont les plus sérieuses et sont considérées comme les plus prestigieuses.
Tout cela est à prendre en compte au moment où vous allez rechercher une offre pour communiquer et publier vos travaux : cherchez-vous simplement à faire votre première communication / publication, ou cherchez-vous à « bétonner » votre CV dans l’optique de passer le concours de maître de conférence, par exemple ?
En fonction de la réponse, soyez attentifs à chaque détail des offres.
Où trouver les appels ?
En sciences humaines et sociales, votre meilleur ami est Calenda : c’est le calendrier des sciences humaines et sociales.
La plateforme référence la grande majorité des appels à contribution des disciplines comme les lettres, la philosophie, les arts, les sciences de l’éducation, la psychologie, les études de genre, le droit, etc.
Calenda vous permet de repérer la plupart des évènements scientifiques qui sont en préparation ou qui ont eu lieu par le passé. Vous vous tenez ainsi à jour de l’actualité scientifique de votre discipline et vous pouvez repérer les appels à contribution – mais aussi les appels à projets et les offres de financements.
En tant que doctorant, vous pouvez assister à la plupart des évènements scientifiques annoncés sur Calenda : vous pouvez donc aller écouter les speakers des colloques et journées d’études qui sont organisés dans les laboratoires français. Vous n’êtes pas obligés de postuler, et pouvez simplement aller voir comment ce type d’évènement se déroule avant d’envisager de devenir speaker.
Lorsque vous vous sentirez prêt, foncez.
Repérez les appels qui vous concernent et qui vous permettront d’aller parler de votre sujet de recherche. Lorsque vous en aurez trouvé, il ne restera plus qu’à envoyer votre abstract et à attendre la réponse du comité d’organisation.
Bien sûr, d’autres plateformes vous permettent de repérer les appels par discipline.
Exemples :
- Fabula en lettres
- ArtHist en histoire de l’art
- Lien Socio en sciences de l’éducation
- Mon préféré : Armacad regroupe l’actualité de la recherche au niveau mondial, avec les appels d’offre les plus prestigieux dans toutes les disciplines de recherche.
Tous ces exemples référencent des appels en France et à l’international.
Pour « faire une veille » sur les appels, c’est-à-dire pour être informé des appels qui peuvent vous intéresser, je vous conseille de vous inscrire sur les sites qui vous intéressent et de paramétrer les catégories d’appels avec les mots-clés qui vous intéressent. Chaque semaine, vous recevrez directement par mail les appels qui vous concernent.
2. Publier et communiquer en doctorat : passage à l’action et décryptage d’une offre
Maintenant que vous êtes prêts, passons à l’action.
Je vais prendre comme exemple une offre trouvée sur Calenda, qui est la plateforme incontournable pour vous en sciences humaines et sociales. Nous allons la consulter ensemble (voir la vidéo en haut de cet article) et je vais faire des remarques en fonction de ce qui m’est le plus souvent demandé.
D’abord, faisons un tour d’horizon global sur Calenda : en page d’accueil, vous avez les dernières offres qui ont été publiées par les équipes qui organisent des évènements en ce moment. Vous pouvez consulter cette page régulièrement pour avoir une idée de l’actualité de la recherche dans votre discipline, mais aussi dans les autres disciplines.
NB : Vous pouvez postuler à une offre en sciences de l’éducation bien que votre sujet de recherche s’inscrive dans les études de genre par exemple, si la thématique le permet.
Je vous suggère ensuite d’aller sur la page « Chercher dans les évènements ». Là, vous avez la possibilité de faire une recherche par mots-clés, mais aussi de filtrer par type d’offres et par disciplines de recherche.
En tête de liste, vous avez les appels à contribution, qui nous intéressent ici. Les autres catégories vous permettent simplement de repérer l’annonce d’évènements scientifiques auxquels vous pouvez vous rendre en tant qu’auditeurs, par exemple.
Vous trouverez plus bas les appels d’offres de financements, de bourses et de prix, qui peuvent également vous intéresser.
L’onglet « Suggérer un évènement » vous permettra de publier votre propre appel, le jour où vous organiserez un colloque ou une journée d’étude.
Aujourd’hui, nous nous concentrons sur la recherche d’appels à contribution et passons donc à la recherche par mots-clés : tapons les mots « culture, art et littérature » – des mots-clés très larges pour prendre un exemple, et que je vous invite à modifier en fonction de vos sujets d’expertise.
Une série de résultats apparaissent.
Prenons le résultat suivant : ici
Il s’agit d’un appel à communication. Comme toujours, l’appel contient un résumé, puis un argumentaire, et les modalités de soumission avec le détail des personnalités qui organisent l’évènement.
Ici, nous avons un résumé très clair, puis un argumentaire qui comprend des axes : c’est le programme de l’évènement, et les angles d’attaque possibles pour cadrer votre soumission. Au-delà de la thématique de la journée, les axes vous permettent de visualiser les différentes facettes du sujet tel qu’il sera abordé le jour de l’évènement.
Les modalités sont ce qui suscite le plus de questions chez les doctorants. Analysons les données de cet appel :
« Les propositions de communication comporteront un titre, un résumé (300 à 500 mots) et l’intitulé de l’axe dans lequel s’inscrit la proposition, ainsi qu’une biographie succincte de l’auteur ou de l’autrice (indiquant le statut et les informations institutionnelles). »
👉 Les propositions de communication constituent donc les « abstracts », il s’agit du résumé de la communication que vous proposez de faire le jour de l’évènement. Ici, l’équipe vous demande de structurer votre document ainsi :
🍀 Un titre : travaillez-le pour le rendre à la fois compréhensible, complet et succinct. Évitez les titres très longs et complexes. Votre titre doit être convaincant et intelligible à la première lecture.
🍀 Un résumé de 300 à 500 mots. Vous verrez, c’est très court. Pour éviter de compter vos mots, servez-vous de la fonctionnalité de Word (voir vidéo). Souvent, vous verrez que les appels précisent non pas le nombre de mots, mais le nombre de signes (espaces compris ou non). La même fonctionnalité de Word vous permettra de visualiser ce que cela représente.
🍀 L’intitulé de l’axe dans lequel s’inscrit la proposition, c’est donc l’un des axes exposés dans l’argumentaire. Cela permet à l’équipe d’anticiper l’organisation de la journée – ils vont par exemple sélectionner 4 propositions par axes. En cas de doute ou d’hésitation entre deux axes, soyez donc stratégiques.
🍀 Une biographie succincte de l’auteur ou de l’autrice (indiquant le statut et les informations institutionnelles). Pour vous donner un exemple, je vous indique directement ce que j’écrivais lorsque j’étais doctorante pour que vous puissiez transposer : « Erika Dupont est doctorante au laboratoire IRHiS de l’université de Lille (UMR CNRS 8529). Sa thèse, financée par l’université de Yale (USA) porte sur les relations artistiques franco-britanniques durant l’entre-deux-guerres. Elle enseigne depuis deux ans à l’université de Lille et représente les doctorants au Conseil du laboratoire. »
Il est ensuite indiqué :
« Elles sont à faire parvenir par mail aux formats .pdf et .docx à Marie-Astrid Charlier, Chloé Delaporte et Marie-Ève Thérenty avant le 16 avril 2023. »
👉 Vous devez donc envoyer un email collectif en mettant chaque membre en copie, sans oublier d’envoyer vos fichiers en deux exemplaires : un fichier .pdf et un fichier .docx, ce qui permet à l’équipe d’imprimer vos documents et de les annoter directement sur l’ordinateur.
Je vous conseille de toujours nommer vos fichiers selon ce modèle : NOM_PRENOM_TYPEDEDOCUMENT.
Mon abstract s’appellerait donc : DUPONT_ERIKA_ABSTRACT
Lorsqu’un CV est demandé, le mien s’appelle : DUPONT_ERIKA_CV
👉 C’est l’usage en recherche de nommer les documents de cette façon. Cela permet aux membres de l’équipe de trier facilement les fichiers reçus.
Enfin, il est indiqué qu’une « sélection de textes fera l’objet d’une publication dans un ouvrage collectif », ce qui signifie qu’après le colloque, les meilleures communications seront sélectionnées pour être publiées.
👉 Si votre proposition est retenue, c’est donc un « coup double » pour vous : il y a ici une communication et une publication à la clé.
Dates du colloque : 19-20 octobre 2023, Montpellier
👉 Bien sûr, n’oubliez pas de bloquer la date dans votre agenda et si votre proposition est retenue, de faire une demande auprès de l’équipe organisatrice pour savoir s’ils peuvent vous rembourser le billet de train. Si la réponse est non, sollicitez votre laboratoire et/ou votre école doctorale, et ne prenez ce déplacement à votre charge qu’en dernier recourt !
👉 Un dernier conseil ?
Vous me demandez souvent ce qu’il faut écrire dans le corps du mail. Voici un exemple tout à fait approprié pour cet appel :
Cher comité d’organisation (ou « Mesdames, »),
Je vous prie de trouver ci-joint les documents relatifs à ma proposition de communication au colloque que vous organisez : « L’art et la littérature à tout prix. Effets et enjeux des récompenses culturelles dans l’espace francophone. »
Je vous en souhaite bonne réception et reste à votre entière disposition pour toute information complémentaire.
D’avance, je vous remercie pour l’intérêt que vous porterez à ma proposition.
Très cordialement,
Prénom et nom
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2 réponses
Très bien expliqué comme d’habitude.
Ces informations m’aident beaucoup.
Je voulais justement savoir comment rédiger un article en lien avec mon thème de recherche.
Merci Olivier, je suis vraiment ravie que cet article vous permette de démarrer ! 😁