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ENSEIGNER PENDANT LA THÈSE : COMMENT TROUVER DES COURS, COMMENT ÇA SE PASSE ET COMMENT S’ORGANISER ?

ENSEIGNER PENDANT LA THÈSE : COMMENTJ’AI FAIT, COMMENT ÇA SE PASSE ET COMMENT S’ORGANISER ?

Enseigner pendant la thèse, vous êtes nombreux à y penser, notamment dans l’optique de poursuivre après le doctorat vers une carrière académique. Vous êtes nombreux également à me solliciter à ce sujet, car vous savez que j’ai enseigné durant les cinq années de mon doctorat, alors j’ai décidé de prendre le temps de vous raconter comment ça s’est passé pour moi. Gardez néanmoins à l’esprit qu’il n’y a pas qu’un seul chemin possible pour enseigner et que toutes les expériences sont différentes. C’est pourquoi je vous livre ici, en plus de mon expérience personnelle, toutes les clés auxquelles je pense pour trouver des heures de cours, organiser votre temps et gérer la préparation de vos cours – comment ça se passe et quel temps de préparation prévoir.

1. Enseigner pendant la thèse : trouver des cours

Pendant ma thèse, j’ai eu la chance d’être sollicitée pour prendre en charge un cours alors que je ne cherchais pas encore à enseigner : je ne me sentais pas prête, je n’envisageais pas encore de faire une carrière académique, et une carrière dans l’enseignement ne me tentait pas du tout. À l’époque, je travaillais comme assistante d’éducation dans des établissements scolaires depuis six ans pour financer mes études supérieures ; j’étais donc au contact d’enseignants du secondaire depuis de nombreuses années et je dois dire que ces contacts ne m’avaient jamais donné envie d’enseigner – c’était même plutôt le contraire.

Malheureusement, mes contrats annuels avec l’Éducation Nationale ne pouvaient pas être renouvelés plus de six ans, donc j’allais me retrouver au chômage à la fin de ma première année de doctorat. Cette année-là, j’ai donc activé mon réseau pour trouver un emploi, et je pense que c’est la première fois que j’ai pris conscience que l’essentiel de mon réseau était constitué d’enseignants : du côté de l’université comme du côté de mon job étudiant et de ma vie personnelle, j’étais entourée de professeurs et de futurs professeurs. D’ailleurs, ma première opportunité d’enseignement s’est présentée lors d’une soirée privée chez mon voisin, qui était maître de conférences à l’université catholique de Lille.

Il me proposait des cours à l’université depuis deux ans, mais j’avais toujours refusé car je ne m’en sentais pas capable. Je me sentais inférieure aux enseignants du secondaire comme à ceux que j’avais à la fac, et je me sentais encore trop immature dans mon apprentissage pour aller « donner des leçons » à des étudiants. Cette fois, le chômage me guettait et d’ailleurs à l’époque, je ne pensais pas avoir droit à des allocations de chômage parce que je pensais être toujours considérée comme étudiante alors que j’étais doctorante – je ferai une vidéo à ce sujet à l’occasion (c’est fait ! voici la vidéo), mais j’en profite pour vous dire en toutes lettres ici que tout doctorant ayant été salarié en France a bien droit au chômage. L’ANCMSP a consacré un article très complet à ce sujet https://ancmsp.com/2012/09/30/chomage-et-fin-de-these-jeunes-chercheurs-faites-valoir-vos-droits/

Donc, dans la peur de me retrouver sans revenus, j’ai accepté la proposition de mon voisin de prendre les cours qu’il me proposait pour la rentrée suivante. Ce que je cherche à vous dire ici, c’est que si vous pensez que l’enseignement n’est pas pour vous et que, comme moi, vous ne vous sentez pas capables d’enseigner, ou pas à la hauteur, pas prêt, pas légitime, il y a de fortes chances que l’enseignement lui-même vous détrompe. Ce que je veux dire, c’est que dès le départ j’ai abordé mes cours à ma manière : humblement, forcément, mais sans la pression de faire une carrière académique, donc sans me soucier du conformisme. Je le faisais pour avoir un emploi, pas pour l’amour de l’enseignement ou dans l’espoir d’être gardée, et je pense que c’est grâce à cet état d’esprit que mon envie réelle d’enseigner et de faire une carrière académique a commencé à se dessiner, qu’elle a pu naître.

Je vous rassure, si vous n’avez pas de voisin maître de conférence qui croit en vous et vous propose des cours depuis des années, il y a d’autres moyens de trouver des heures : si vous n’êtes pas sous contrat doctoral avec des heures attribuées, parlez à votre directeur de votre envie d’enseigner. Il gardera peut-être une oreille ouverte et vous préviendra s’il entend quelque chose. Évidemment, ne comptez pas que là-dessus.

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Si vous êtes en fin de doctorat, vous pouvez faire des candidatures pour devenir ATER – le directeur doit attester que vous allez soutenir votre thèse dans l’année. Personnellement, j’ai fait plusieurs candidatures dans ma dernière année de doctorat et j’ai trouvé ce processus horrible, parce que j’ai eu le sentiment de devoir rentrer dans une case préconçue ; on vous demande d’aller sur un poste d’enseignement et de recherche en vous disant d’avance ce que vous devrez enseigner et chercher, ce qui n’est pas logique dans le cadre d’un doctorat : cela suppose que ça cadre parfaitement avec votre sujet de recherche, ce qui n’est pas possible puisque ce dernier se doit d’être novateur et que vous en êtes a priori le seul expert. Comment un poste d’enseignement et de recherche pré-existant pourrait cadrer avec un projet doctoral ? Pour moi, c’est un non-sens mais passons.

Pour postuler, il faut créer un compte sur le portail Galaxie puis télécharger les documents à fournir pour la constitution de votre dossier. Ensuite, vous recevrez un mail pour télécharger votre dossier de candidature et vous l’envoyez après l’avoir complété. Vous pouvez aussi parfois postuler à un ATER sans passer par Galaxie, certaines universités faisant parfois leur propre recrutement. Si vous n’avez aucune réponse après la date indiquée sur le dossier, c’est peut-être que votre candidature n’a pas été retenue, mais pensez à checker régulièrement le portail Galaxie car il se peut qu’ils ne vous préviennent même pas que votre candidature est retenue (oui, c’est du vécu).

Si vous n’êtes ni sous contrat doctoral, ni en fin de thèse, il reste l’option des vacations. Attention néanmoins : être vacataire de l’enseignement supérieur n’est qu’un statut, vous n’aurez pas nécessairement de contrat de travail. Cela signifie que vous ne cotiserez pas pour votre retraite ou le chômage via ce travail, qui n’est pas un travail salarié à proprement parler. Vous n’aurez qu’une rémunération pour la totalité de vos heures une fois la « mission » terminée – donc pas de salaire, mensuel. En revanche, si vous êtes bénéficiaire de l’ARE, votre rémunération pour vos heures sera soustraite à vos droits ARE pour le mois où vous les percevrez. Par exemple, si vous bénéficiez de 950€ mensuels d’ARE et que l’université vous verse 700€ pour vos heures, vous ne percevrez que 250€ d’ARE ce mois-là. Si vous n’avez pas d’actions en bourse chez la SNCF, évitez aussi d’accepter des vacations trop loin de chez vous : vous ne bénéficierez pas du remboursement partiel de vos frais de déplacement par l’université, puisque vous ne serez pas sous contrat de travail (sans contrat de travail, pas d’employeur attitré).

Ces mises en garde vis-à-vis du statut de vacataire étant clairement résumées, je reprends : vous pouvez, si vous le souhaitez, faire des vacations. En général, vous êtes chargé de TD donc vous serez supervisé par un MCF ou un PR durant le semestre. Pour trouver ces vacations, je ne connais pas d’autre moyen que d’en parler au maximum autour de vous. Allez voir l’ingénieur de recherche de votre laboratoire, le secrétariat du labo, l’UFR, le secrétariat de l’UFR, envoyez des mails à tous les MCF de l’UFR qui vous intéresse, en somme : parlez-en à toutes les personnes du laboratoire et de l’UFR, dites-leur que vous voulez devenir vacataire. Ce statut est tellement précaire que les MCF de certaines UFR ont parfois des difficultés à en trouver – cela dépend des domaines.

Dernière option, rarement envisagée : enseigner dans des universités privées. Personnellement, je suis devenue vacataire à la fac alors que j’avais déjà des cours dans l’université privée où mon voisin était MCF. L’intérêt des universités privées, c’est que vous êtes sous contrat. Vous êtes généralement mieux rémunéré, et surtout vous avez un contrat de travail avec un salaire qui tombe tous les mois à date fixe. Vous n’êtes pas supervisé par un MCF, vous êtes donc beaucoup plus libre dans votre programme. Personnellement, j’ai travaillé à l’université catholique de Lille (à la FLSH) sur plusieurs départements et j’étais totalement libre de choisir mes sujets, d’élaborer mes programmes et de travailler sur ce que j’avais envie de faire découvrir aux étudiants. De ce point de vue, c’était formidable et sur cette expérience professionnelle, je n’ai vraiment pas grand-chose à redire.

Pensez donc aux universités privées qui sont près de chez vous : vous pouvez démarcher les secrétariats et les enseignants par mail, et sachez que les MCF du privé sont souvent présents dans les journées d’études et autres colloques du public. Dans le privé, il n’y a pas de laboratoires, donc les enseignants du privé qui sont titulaires de doctorats et veulent continuer la recherche doivent publier et communiquer là où ils peuvent – dans le public. Ils sont parfois rattachés à des laboratoires des universités publiques et cherchent à garder des liens avec le public pour avoir des postes – beaucoup de Docteurs qui n’ont pas de poste en début de carrière se font recruter dans le privé en attendant. N’hésitez donc pas à les approcher quand vous en avez l’occasion.

Enfin, sachez que le plus difficile est de trouver un premier cours à prendre en charge. Une fois que vous êtes « dans le circuit », il est beaucoup plus aisé de récupérer d’autres cours, à condition de vous intégrer dans les équipes et d’être aussi actif que possible. Faites-vous connaître, parlez lors des pauses déjeuner, échangez avec vos collègues, soyez présents aux réunions, faites des propositions aux directeurs des départements, qui seront toujours heureux de vous recevoir. Soyez partout – mais humblement et en finesse – c’est ainsi que vous vous ferez une place, qu’on commencera à penser à vous et que les opportunités se multiplieront.

2. La préparation et le déroulement des cours

Maintenant que vous avez récupéré un ou plusieurs cours, il va falloir enseigner. C’est souvent là qu’on réalise qu’en fait, le plus difficile est à venir. Mais pas de panique. Si vous avez peur de votre premier cours, c’est complètement normal. Aucun collègue ne m’a jamais dit qu’il n’avait pas eu peur ou qu’il avait été excellent lors de son premier cours. On n’est jamais trop fier de ce genre de moment, à tort d’ailleurs parce qu’à mon sens, on peut déjà être fier de l’avoir fait.

Le jour J, chacun gère à sa manière. Comme je le disais la semaine dernière, certains se lèveront à 6 heures et iront faire un footing avant leur premier cours, d’autres seront incapables de bouger ou de respirer pendant 48 heures avant d’y aller – ça, c’était moi.

Personnellement, j’avais pu anticiper sur la date de rentrée : je savais dès le mois de mai que j’allais enseigner en septembre, mais cela ne se passe pas toujours comme ça. Quoi qu’il en soit, je ne répèterai jamais assez qu’il faut vous connaître parfaitement pour gérer ce genre d’évènement. Certains auront déjà enseigné dans le secondaire, d’autres auront déjà communiqué en public, d’autres encore n’auront jamais parlé en public avant de faire leur premier cours à l’université. Forcément, chacun se préparera en fonction de son expérience. Dans tous les cas, ce sera gérable et vous en êtes capables !

Le plus difficile est de prendre la parole lors du tout premier cours. Ensuite, le cours va se dérouler puis vous ferez le second, la première semaine va se dérouler aussi puis la seconde, et le semestre va glisser sans que vous ne vous en rendiez-compte. Pour ma part, j’avais huit ou neuf heures de cours durant mon premier semestre, puis j’ai cumulé d’autres cours dans la même université, puis j’ai ajouté des heures de vacations dans le public. En tout, j’ai parfois atteint plus de quinze heures de cours par semaine mais je ne recommande à personne d’avoir ce rythme en doctorat. Pour moi, ce fut gérable parce que j’ai eu ces cours progressivement, donc je n’avais pas besoin de tout préparer de la même manière tous les ans. De même, j’avais deux cours divisés en groupes : j’avais parfois deux ou quatre groupes pour un seul cours à préparer.

Attention, la difficulté principale de ces cours-là est d’anticiper le temps que prennent les corrections de travaux. Plus avez de groupes, plus vous aurez de travaux à corriger parce que les cours en groupes sont souvent des TD. Mes autres cours étaient des CM donc je passais plus de temps à préparer les heures de cours, mais beaucoup moins à corriger. Si vous avez des TD, faites attention à cela. Corrigez au fur et à mesure, ou bloquez beaucoup de temps en fin de semestre pour vous consacrer aux corrections.

Pour les préparations de cours, je m’y prenais parfois à l’avance, parfois à la dernière minute. Avec l’expérience, vous apprendrez à savoir ce qui est le mieux adapté à votre façon de travailler. Personnellement, j’ai eu tendance à vouloir préparer mes premiers cours longtemps à l’avance, parce que j’étais stressée. La première année, j’ai passé mon été sur mes cours et j’ai complètement délaissé ma thèse. J’avais tellement peur de ne pas être assez préparée que j’ai voulu tout faire bien en avance, mais plusieurs problèmes se sont posés dans cette dynamique-là :

D’abord, je n’ai pas repris ma thèse comme je le pensais en septembre, parce qu’on a beau se préparer, les premières semaines de cours sont épuisantes et je n’ai pas eu l’énergie de me remettre dans ma thèse en septembre. Ensuite, si vous préparez en mai un premier cours pour septembre, c’est bien, mais personnellement en septembre j’avais oublié la moitié de mon cours préparé en mai. Gardez en tête que vous n’allez pas forcément enseigner des notions qui sont en rapport direct avec votre sujet de recherche – quand vous devez travailler sur un texte pour un cours de prépa au master de sciences politiques alors que vous êtes historien de l’art contemporain, préparer vos cours trop longtemps en avance est une erreur de débutant. Vous devrez le préparer à nouveau avant d’entrer dans la salle.

J’ai remarqué aussi que pour mes cours d’histoire de l’art, j’étais beaucoup plus à l’aise quand je préparais moins mes cours. Ils étaient plus dynamiques, j’étais plus alerte, plus vigilante, j’anticipais mieux les questions des étudiants et j’étais plus concentrée sur mon propos. J’étais à fond, alors que si j’arrivais avec mon cours parfaitement préparé et rédigé, je m’ennuyais et je pense que les étudiants aussi. Il y avait moins d’interactions, les cours étant moins spontanés. Par conséquent, n’ayez pas peur des cours qui sont au plus près de votre domaine de recherche, car vous saurez répondre aux questions et quand vous n’aurez pas la réponse, vous saurez dire pourquoi vous ne savez pas. Parfois, on ne sait pas parce que ce n’est pas le bon angle de vue, que la question est mal posée ou parce que la recherche elle-même ne sait pas. Vous voyez ce que je veux dire ? On connaît les limites de notre discipline et de façon générale, les étudiants sentent si vous êtes à l’aise ou pas sur un sujet. Ne pas savoir, ça va vous arriver mais vous saurez gérer cela si vous savez de quoi vous parlez.

Pour vos préparations, sachez aussi que vous aurez tendance à voir beaucoup trop grand au début. Vous aurez l’impression qu’une heure de cours dure une éternité, alors qu’en fait ça passe très vite. Ne préparez pas trop en avance et prévoyez des interactions : répondre à une question prend du temps. De même, plus on prépare nos cours, moins on a tendance à demander aux étudiants s’ils ont des questions. Parfois, on prépare tellement bien qu’on a le sentiment d’avoir fait le tour du sujet et inversement, quand je préparais moins bien mes cours je demandais souvent à mes étudiants si j’étais claire, s’ils avaient des questions, et c’est aussi pour ça que c’était plus dynamique : ils ont beaucoup de questions, mais ils n’osent pas les poser !

Demandez plusieurs fois par heure s’il y a des questions, vous verrez le résultat. Non seulement elles vont arriver, mais elles vont augmenter votre capital sympathie auprès d’eux car vous serez plus spontanés en répondant aux questions qu’en faisant cours, et ils vous sentiront soucieux de faire passer quelque chose, d’être clair, d’être bon, de vous intéresser à eux. Pour moi, c’est primordial. N’ayez pas peur de vos étudiants et d’interagir avec eux, car plus vous échangerez, plus vous serez à l’aise avec eux, et plus ils le seront avec vous, c’est un cercle vertueux pour tout le monde. Ces moments pour les questions sont toujours des moments privilégiés, et je pense que c’est grâce à eux que j’ai réellement évolué en tant qu’enseignante, c’est par là que vient la réelle expérience de l’enseignement.

Mais ce n’est que mon avis ! Et vous, qu’en pensez-vous ? Dites-moi tout, et sachez que si vous avez besoin d’être accompagné dans vos premiers pas vers l’enseignement, que ce soit pour préparer vos candidatures, pour démarcher des MCF ou des administrations, ou pour préparer vos cours et vous organiser, vous pouvez me contacter directement via ce lien  👉 https://calendly.com/dupont-erika/premier-rendez-vous

Vous laissez vos coordonnées et je reviens vers vous, on fait le point ensemble lors d’une première séance offerte et on prépare un plan d’action.

Bon courage à tous, je vous souhaite une excellente semaine de pré-rentrée et je vous dis à la semaine prochaine !

Erika

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